LA QUETE AU FEMININ ET AU MASCULIN:
Dans "La Jeune fille Sans Mains", l'héroïne ne guérit que parce qu'elle a accepté P.167 de s'écarter de la vie collective et de demeurer seule dans les bois.
Ce thème est très fréquent et me semble correspondre de façon caractéristique à l'un des problèmes de la psychologie féminine.
De l'extérieur, cette retraite peut sembler une période de complète stagnation, a1ors qu'en réalité, il s'agit d'un temps d'initiation et d'incubation qui permet qu'une profonde dissociation psychique se répare et que des problèmes se résolvent ; de plus, la personnalité s'enrichit grâce à des expériences intérieures profondes.
Ce thème fait contraste avec la quête plus active du héros masculin qui doit souvent s'en aller dans l'Au-delà et abattre le dragon, trouver le trésor ou conquérir la princesse.
Il lui faut habituellement faire un long voyage et accomplir quelque haut fait, au lieu de tout simplement s'éloigner de la vie active.
Il semble donc bien y avoir une différence caractéristique entre les voies des principes masculin et féminin, la seconde étant plus passive, plus contemplative.
Ceci a évidemment affaire avec les divergences entre l'animus et l'anima.
En psychologie masculine, on peut dire que l'anima amène l'individu à s'empêtrer dans la vie et ses problèmes, le met en relation avec les instincts et les pulsions, et se confronte ainsi à un problème éthique.
Mais l'anima ne pose jamais directement à l'homme le problème de sa Weltanschauung ; elle le place plutôt, de façon indirecte, dans une situation extérieure telle qu'il se trouve obligé de reconsidérer toute son attitude envers la vie.
La femme, elle, dès qu'elle entre en contact avec l'inconscient, est plus directement confrontée à la philosophie de la vie et au problème du mal, parce que l'animus est concerné par les idées générales et les concepts.
Dès qu'elle entreprend le voyage à l'intérieur d'elle-même, elle se trouve en face du problème spirituel.
La jeune fille de notre conte se trouve confrontée à un problème religieux profond, puisqu'elle est mise en relation d'abord avec le Diable, puis avec l'Ange.
Le Mauvais essaie de s'emparer d'elle, mais c'est sous la protection de l'ange qu'elle parvient à se libérer. Elle rencontre donc la divinité sous ses deux aspects, l'obscur et le lumineux, l'ange étant le messager de Dieu ou Dieu lui-même . P.169
La quête de la femme ne consiste pas comme celle du héros, à combattre un dragon ou à accomplir quelque haut fait, mais prend la forme plus passive et plus intérieure de la retraite hors de la vie active et de la recherche de l'attitude juste à travers une période d'incubation. P.195
"Les Six Cygnes" et "Les Sept Corbeaux" traitent également de cet aspect de l'animus qui met une femme à l'écart, pour un temps, de la vie active.