1-La profondeur abyssale du corps humain:

"... savoir ce qu'il est advenu de cette relation, si caractéristique de l'image maternelle avec la terre, avec l'obscurité et la profondeur abyssale du corps humain, à la nature instinctive et passionnée... avec la matérialité ?" (Jung)
Par l'assomption du principe féminin désormais " son corps humain lui-même que est ... ce qu'il y a de plus assujetti la putrescibilité de la matière grossière" ne nous est plus seulement inférieur, mais aussi supérieur. Matière et esprit cessent d'être des extrêmes radicalement opposés puisque le dogme en célèbre l'union : la valeur de la terre et le corps féminin ont été reconnus. Mais cette élévation de l'inférieur relativise à son tour le supérieur : l'esprit ne peut plus désormais régner de manière absolue. Il s'est trouvé abaissé, au bénéfice d'un rapport nouveau avec le féminin, pour rendre possible une nouvelle unité.
Ce dogme fait pressentir une image unitaire du monde ... La relation matière-esprit et les difficultés que présentent leur harmonisation reflètent des problèmes dans l'accord des opposés que nous nommons corps et esprit, ou masculin et féminin. C'est dans cette métaphore du masculin et du féminin que le dogme de l'assomption pose le problème.
L'image unitaire du monde dépend des représentations psychiques du masculin et du féminin ... parler d'unus mundus , et d'une science où matière et esprit cesseraient de s'opposer en une polarité hostile n'est que projection intellectuelle si il n'y a pas un changement d'attitude correspondante vis-à-vis de la part matérielle de l'homme lui-même, laquelle a toujours été associée au féminin dans notre tradition.
La transformation de notre conception du monte exige celle de notre conception du féminin. La conception de l'homme sur la matière se transforme en même temps que sa conception du féminin ... Cette transformation du féminin est une évolution de la conscience par rapport au corps humain, à sa matérialité propre et à sa nature instinive. Une image métaphysique unitaire du monde exige une unification de l'image de soi dans la psychologie, une conjonction de l'esprit et de la matière représentée par le masculin et le féminin. L'idée d'infériorité féminine est paradigmatique de tout un groupe de problème ...
Nous appelons désormais "archétypes" ces idées paradigmatiques aux ramifications omniprésentes. Mais l' archétype n'est pas uniquement un phénomène psychologique ; il est un phénomène psychoïde ... Il influence donc la psyché comme il influence d'autres domaines et d'autres sciences en tant que donnée primordiale.
La psychée individuelle possède une connaissance de sa nature propre : il s'agit de sa subjectivité réflexive, de ses souffrances, de sa pathologie et de ses fantaisies -par quoi l'archétype s'exprime individuellement et directement, et grâce à quoi la psychopathologie est une révélation, une gnose.

2-D'abord Adam puis Eve :
La primauté masculine et la nature seconde et dérivée de la femme trouvent dans notre culture leur locus classicus dans l'histoire d'Adam et Eve ... Ce qu'Eve peut avoir de divin ne lui échoit qu'au second degré, à travers la substance adamique. Le thème "d'abord Adam, puis Eve" se développe de plusieurs manières : -L'homme est antérieur temporellement car il fut créé le premier. -L'homme est supérieur, puisqu'il est dit de lui seul qu'il fut créé à l'image de Dieu. -L'homme a une conscience supérieure, Eve ayant été extraite du profond someil d'Adam, de son inconscient. Le sommeil d'Adam est un état de faiblesse. Eve est le sommet de l'homme. -Adam est supérieur par la substance, Eve étant préformée en Adam comme une parties dans un tout. Adam est parfait au commencement, reflet de la perfection même de Dieu. L'existence, l'essence et la substance matérielle d'Eve dépande d'Adam. Il en est la cause formelle, puisqu'elle existe préalablement en lui ; il en est la cause matérielle, puisqu'elle est tirée de son flanc ; il en est la cause finale, puisque le but et la fin d'Eve sont d'aider Adam.
L'homme est la condition préalable du principe féminin, le champ de ses possibilités. Page 178
(Berdiaev place le sexuel chez la femme; celle-ci est porteuse de la sexualité dans l'univers; l'homme est moins sexué que la femme, c'est la leur principale différence.) Ceci implique que si le sexe est le lieu spécifique de la différence, il est aussi le lieu spécifique ou démontré cette différence et la priorité adamique. La différence entre homme et femme devient ainsi différence entre mâle et femelle c'est-à-dire une différence sexuelle ; la lutte devient une lutte sexuelle ; et la conjonction des principes masculin et féminin prend la forme d'une union sexuelle. Ce mode de raisonnement est le plus tenace et le plus pernicieux obstacle à la conjonction, c'est aussi là que se situent les problèmes psychologiques les plus opiniatres et les plus réfractaires. C'est "dans la profondeur abyssale du corps humain ", que la psyché est ensevelie; dans la "physis", dans l'étreinte obscure de la matière féminine, comme aurait dit les alchimistes.
Tant que le physique représentera le féminin il ne cessera de faire l'objet de projections antiféminines.
D'après le "manichéisme" la matière, le mal, l'obscurité et le féminin sont des conceptions interchangeables. L'aspect matériel du féminin subit une distorsion doublement négative. Plus la matière sera féminine et plus sera mauvaise; plus le féminin sera matérialisé, et plus il sera ténébreux. C'est par rapport au corps physique de la femme que les fantaisies concernant l'infériorité féminine s'épanouissent le plus ...
"Toute théorie du corps humain fait toujours partie de la philosophie." (Edelstein), "La recherche de l'utilité des différentes parties du corps" est une activité philosophique.(Galien).... Toute théorie du corps humain fait toujours partie d'une image du monde ... Une théorie du corps humain procède toujours en partie d'une fantaisie.
La fantaisie intervient tout spécialement la où la connaissance exacte fait défaut ; et lorsqu'elle intervient, la connaissance exacte devient particulièrement difficile à acquérir. Le mythique usurpe le rôle de la théorisation et acquiert une place de témoin : on croit ce que l'on voit, mais on voit ce qu'on veut croire. Nous voyons ce que nous croyons exister et nous justifions nos a priori avec ce que nous voyons.
L'histoire fournit une voie d'entrée dans l'imaginal ; elle est semblable à une avenue par laquelle notre regard plonge dans l'archétype. Elle constitue une discipline psychologique qui procure une perspective archétypique. (Voir le facteur fantasmatique affectant les théories et les données de l'observation de la conception et de l'embryologie. Ce n'est qu'en 1875 qu'il fut enfin prouvé expérimentalement que la semence pénètre de l'oeuf, et que le nouvel individu résulte de cette conjonction. page 181 L'ovule humain ne fut pas découvert avant 1827 et ce n'est qu'au tournant de ce siècle qu'on établit clairement la relation cyclique entre menstruation et ovulation...L'obscurité du féminin encourage la fantaisie. )
L'embryologie étant un logos des commencements, est influencée par des mythèmes de création. Les théories de la génération, reflétant les différences et l'union des opposés, seront influencées par les fantaisies de conjonction. L'homme est la proie de fantaisies encore plus fondamentales par rapport à la femme lorsqu'il est l'observateur et la femme l'objet observé.
Ce sont des désaveux répétés du féminin formulé dans le langage objectif et irrécusable de la science du temps. Le facteur mythique resurgit sous le déguisement de nouvelles preuves ...
Dans les Euménides d'Eschyle, le facteur mythique apparaît sous la forme dieu Apollon, présentant une théorie de la reproduction. Il déclare "Ce n'est pas la mère qui enfante celui que l'on nomme son enfant: elle n'est que la nourrice du germe en elle semé. Celui qui enfante, c'est l'homme qui la féconde ... On peut être père sans l'aide d'une mère." Cette déclaration exprime une position archétypique, mettant en évidence une vision du monde apollinienne. La fantaisie apollinienne, concernant la reproduction et l'inférieurité féminine, se reflète fidèlement dans la tradition scientifique occidentale. Elle équivoque l'objectivité purifiée et la clarté scientifique de la conscience masculine. Apollon étant le père d'Esculape, dieu de la médecine, les théories médicales mettent en évidence ces attitudes de conscience apolinienne.

3-La semence féminine
"la femme a-t-elle une semence ?" Habet mulier animam ?
Chaque fois que dans notre tradition, on concéda à la femme l'existence d'une semence propre, la semence féminine était jugée inférieure.
Une théorie spécifique de la semence féminine n'est pas la conséquence nécessaire et logique d'un certain type de société. L'imagination ne s'accorde pas ou ne compense pas nécessairement la doctrine collective. Les fantaisies sur la semence féminine ne dépendons pas des formes sociales.
Une théorie de l'infériorité féminine est incompatible avec l'affirmation de l'importance ou de la valeur de la semence féminine.

4-Aristote
" Il est nécessaire qu'il existe un être qui engendre et un être d'où sort l'être engendré, ... Si donc le mâle est comme le moteur et l'agent ... la femelle ne peut apporter de la semence, mais une matière... la nature des menstrues appartient au domaine de la matière primordiale."
La femelle fournit la prima materia, l'alimentation, et le lieu de développement de l'embryon. Son role est nécessaire. Mais le principe actif, formateur et générateur vient entièrement du père.
La contribution féminine est constituée par le sang menstruel, généralement tenu pour une substance taboue, un déchet, ou au mieux un agent de purification. Dans lar théorie artistotélicienne la semence est une forme superlative du sang ... hautement concoctée par un processus de transformation attelé pepsis.
Le sang qu'apporte la femme au processus de reproduction n'a pas encore atteint sa réalisation supérieure
Il en est ainsi puisque la femme est le sexe froid qui ne possède pas la chaleur infuse nécessaire à la cuisson du sang ... Comme elle ne possède pas de semences, il lui manque la causa formalis lui permettant d'engendrer à partir d'elle-même sa propre essence. Cette dernière est donc soumise au masculin, dont l' essence contient à la fois le masculin et le féminin. Comme dans le mythe de la genèse, l'homme contient virtuellement la femme ...
Dans la cosmologie de Diogène, l'air est l'élément primordial et joue un rôle capital dans la théorie de la semence.eL'air est l'élément pneumatique qui concocte le sang en la substance subtile du sperme, plus léger, plus blanc et davantage porteur d'âme. L'air est aussi esprit et intelligence. Parce qui lui manque l'élément pneumatique et que sa semence est inférieure, la femme a moins d'âme et moins d'esprit.
Dans les vues de Thomas d'Aquin la femme est ignobilior et vilior, plus ignoble et plus vile que l'homme. Dans les écrits des Pères del'Eglise, la misogynie s'exerce de manière virulante sur le corps de la femme. "la profondeur abyssale du corps humain à la nature instinctive et passionnée" est considérée comme pénétrant l'homme par l'intermédiaire de la femme. La femme est plus près de la matière et son infériorité décrite comme un état répugnant.
Le corollaire de cette répression est la fascination et la lubricité.

5-Blanc et rouge
Le couple blanc- rouge représentant mâle et femelle est bien connu de l'alchimie, mais là le rouge est masculin. Dans la tradition juive le père "sème le blanc" et la mère "sème le rouge".
Dès qu'apparait l'idée de concoction, le rouge féminin n'est qu'un état incomplet, antérieur à celui du blanc masculin.

6-Mûr-non mûr; sphérique-ovoïde; droite-gauche
La supériorité fondamentale de la semence blanche par rapport au sang rouge vient de sa meilleure concoction. Elle est plus sèche et plus coagulée.. son état étant plus avancé, le principe masculin est dès le départ plus mûr que le féminin. L'homme est plus actif et nécessite moins de "temps de perfectionnement" ... Le foetus masculin est supérieur au féminin parce qu'il murit plus vite ... Un pouls rapide révèle un foetus de garçon ; la bonne humeur, la joie et la douceur diagnostiquaient une naissance de garçon; une naissance de fille: conçue à partir d'une substance inférieure, portée au prix de la paleur et extraite de la dépression de la mère.
Par la période au bout de laquelle l'embryon s'anime, la supériorité masculine entra dans le droit canon.
L' âme masculine apparaissait plus tôt...
Dans le choix entre la forme sphérique "contre" la forme ovoïde de l'oeuf ... le supérieur reste toujours mâle. Si la forme sphérique est la plus parfaite, alors l'oeuf sphérique est masculin. Si l'ovoïde présente l" ovité" la plus parfaite, alors cet oeuf sera mâle.
L'apollinien préfère ce qui parfait et découvre la perfection dans la forme.
Ainsi, l'oeuf lui-même, symbôle féminin par excellence, présentait des aspects supérieurs et inférieurs, et pouvait être utilisé pour démontrer l'infériorité féminine.
"A droite les garçons, à gauche les filles" ..La théorie gauche-droite comporte les habituelles implications de l'infériorité féminine. Dans notre tradition, "le pouvoir de la main gauche est toujours quelque peu occulte et illégitime ; il inspire terreur et répulsion"
"gauche = féminin" n'est pas une loi universelle. Et l'infériorité de la gauche n'est pas aussi répandue que nous pourrions le croîre, nous qui vivons au coeur d'une tradition favorisant la droite. En Chine et chez les mystiques juifs et les indiens de Delaware "la gauche est sacrée, la droite profane" "
"Les érudits entretiennent fréquemment une préférence pour le côté droit" (Fritsch)
Cette ligne de pensée, commençant avec la Genèse et avec Apollon, développée par des hommes de sciences et de raison, a exercé un effet manichéen sur les recherches, en faveur de la "droite", comme expression de la supériorité masculine. La conscience est droitière, soit par la main, soit par l'oeil ...
Nous voyons les choses comme les principes dominants voudraient les voir ... Mais derrière la vision des sens se situe celle de l'archétype, et nous ne pouvons nous fier à nous-même dès que nous perdons la conscience intérieure du facteur subjectif qui influence nos observations... nous perdons la vision des dieux, et le sens de leur influence sur le facteur subjectif enjeu dans nos opinions.

7-Galien
Il semble inaugurer une nouvelle tradition reconnaissant à la femme une place physiologiquement égale dans la reproduction.. il soutint l'existence d'une semence féminine ... En reconnaissant la semence féminine, il admettait un potentiel créateur chez la femme ... Comparée à la semence masculine, il trouve celle de la femme "plus légère", "plus froide", de "viscosité plus grande", "plus faible", "quantitativement inférieure" et finalement, de "tonus moindre"
Les organes génitaux masculins sont danscette théorie une "extraversion" des organes féminins. Cette extraversion représente un stade plus évolué, un accomplissement plus complet. Le système masculin reste le modèle analogique. L'homme était le prototype, la femme l'analogue. L'homme est le réalisé, le parfait, le véritable. La femme reste encore "in nuce", enfermée dans le périnée, à l'état de potentialité, n'ayant pas atteint la maturité. Elle ne possède pas la chaleur infuse permettant de connaître la maturité...

8-Freud
Le passé est réorganisé en un nouveau système, si bien que l'ancien est retenu dans son sein et l'influence de l'intérieur ... Observations et imaginations se mêlent et perdent ce qui les distinguent ... "..Freud soutient que la libido de la petite fille est plus mâle que femelle, parce que l'activité et auto-érotique de l'enfant se porte surtout sur le clitoris. Il ajoute qu'il se peut que toute libido étant, comme toute pulsion, de par sa nature même, active, doit être essentiellement mâle". (Jones)
Si la force vitale, parce qu'elle est active, et principalement masculine, la femme est alors un opus contra naturam. Son envie du pénis ne réflète que sa lacune fondamentale, sa force vitale défectueuse et son insécurité structurelle innée.
L'observation -ou l'imagination- selon laquelle les petites-filles considèrent leur forme génitale comme une privation et quelque chose de non naturel est à la base de toutes les vues ultérieures de Freud sur l'essence de la femme. Son appareil génital affaiblit est "source d'infériorité".
La fantaisie de Freud sur l'esprit de la petite-fille devient un "fantasme" freudien dans l'esprit de la petite-fille. La fantaisie fondamentale de Freud est mise dans l'esprit des enfants comme si c'était leur 'fantasme". L'enfant, comme la "horde primitive" du passé préhistorique, est une tabula rasa ou une prima materia
inconnue, et l'on se fonde sur son vide pour donner libre cours à ses fantaises sans contradiction, ni même réaction. La véritable origine qui fonde la théorie, est la fantaisie archétypique et non la scène objective ...
L'origine de la théorie est dans l'image ... procède de l'image qui apparaît lorsque nous considérons la tabula rasa, le champ obscur et inconnu du primate, du primitif, de la préhistoire, ou de l'enfant.

9-Des sources physiologiques de la faiblesse d'esprit chez la femme
Moebius établit la base de l'infériorité physiologique féminine dans le cerveau; il constate que l'aire de l'infériorité n'est plus le système sexuel ou les "nerfs". On est passé à la zone "supérieure", zone qui selon lui rend la femme la plus dangereuse. Il déclare que la faiblesse d'esprit féminine est une nécessité et un postulat physiologiques, la femme étant une espèce de "stade intermédiaire entre l'enfant et l'homme..." le soint de l'espèce lui incombe en premier lieu, en tant qu'épouss et mère ...
En Weininger fusionne tous les thèmes de notre recherche : la femme n'a pas d'âme, elle est sexuellement matérialiste et mentalement inférieure.

10-Premières conclusions
La même notion d'infériorité féminine,. s'est transmise de l'antiquité à la psychanalyse avec une fidélité jamais démentie. Il faut croire que l'histoire n'a aucun effet sur la structure permanente d'un archétype ... On a affaire à une énentiodromie, une répétition incroyablement partiale de la même incapacité à considérer que la coniunctio comme nécessaire à la procréation d'un nouvel individu. Dans les expériences alchimiques, la conjonction était présentée comme condition fondamentale préalable à la conception de l'homuncule et à la naissance d'une nouvel être. L'alchimie était animée par une structure de conscience autre. La conscience y est unie à la matière dès le départ ; elles s'enveloppent l'une l'autre, si bien que la bisexualité de la coniunctio est implicite tout au long du processus.
Dans la science, la conscience perçoit la matière, plaçant une "coupure", une frontière entre elle et cette dernière. Dans la science, la féminité de la matière ne peut jamais être vraiment connue ...
Le mélange d'observation et d'imagination fait perdrede vue à l'observateur la structure de sa propre conscience et de ses fantaisies.
Si l'on conçoit pas les opposés comme une symétrie de deux éléments indépendants et distincts mais nécessaires l'un à l'autre, la coniunctio ne sera pas équilibrée. L'infériorité féminine maintient ce déséquilibre, qui se solda par ce type de coniunctio qualifiée par l'alchimie de monstrum : les proportions aberrantes de notre conscience moderne, sa conception de la féminité comme inférieure, que cette composante féminine soit la psyché ou le corps ; il eut également pour résultat la nécessité pour la psychothérapie de faire évoluer cette féminité faible et inférieure.
Nous ne savons pratiquement rien de la manière dont une conscience féminine, ou ayant intégré certains aspects féminins, considérerait les mêmes données.
Cette conscience particulière appelée scientifique, occidentale, moderne, outil de l'esprit masculin affuté depuis bien longtemps, et qui a écarté une part de sa propre substance en l'appelant "Eve ", "femme", "inférieur", nous la qualifions de conscience apollinienne et comme son éponyme, elle est l'apanage de la jeunesse, elle tue à distance (sa distance tue) et en maintenant la coupure scientifique de l'objectivité ne se fond ou ne se "marie" jamais à son matériau. C'est une structure de conscience n'ayant qu'une relation éloignée avec le féminin, dans le sens où nous l'entendons, "la profondeur abyssale du corps humain à la nature instinctive et passionnée.. la materia". La fantaisie apollinienne n'est pas exclusivement masculine, en tant que structure archétypique, elle est indépendante du genre de la personne par laquelle elle opère, si bien que l'intégration du féminin concerne les hommes mais aussi les femmes.
La structure apollinienne étant archétypique, y intégrer la féminité est un problème archétypique qui dépasse le niveau humain des besoins et du développement personnels. Cette structure de conscience a produit des théories garantissant la supériorité de la conscience masculine et l'infériorité de tout élément opposé avec lequel on le mettra en conjonction. On ne sortira pas de ce dilemme tant que cette structure jahviste ou apollinienne informera non seulement la pensée scientifique, mais la notion même de conscience. Pour une telle conscience, l'élévation du principe féminin semble impossible structurellement ; elle est amenée à reproduire les mêmes vues misogynes, à cause de son fondement (et des limitations) archétypique Tant qu'une structure archétypique différente n'animera pas d'un esprit nouveau notre conception des choses et de l'"être conscient" nous ne cesserons de reproduires nos fantaisies misogynes de l'union masculin-féminin .

11-L'hystérie
La découverte de l'inconscient et la validation de l'hystérie sont théoriquement interdétendantes.
L'hystérie considérée longtemps comme une maladie exclusivement féminine a fourni le point de départ de la psychanalyse ...
Quel archétype se trouve derrière l'hystérie ?
Quelle Weltanschauung d'une puissance surhumaine pouvait bien se manifester, vers la fin du siècle passé, par ces phénomènes nommés absence, trans, arc de cercle, érotisme religieux, conversion de symptômes psychiques en symptômes physiques.. "affects douloureux, cris, hurlements, délire" dit encore Freud.
L'hystérie, maladie de la matrice, apparait avec Hippocrate..
On considérait la matrice comme animée de mouvements propres et autonomes, comme un "créature vivante" ou "animale" L'hystérie résultait de l'effet du désir animal chez la femme; maladie dans laquelle l' animalité autonome dominait l'être humain, séparant la femme de pneuma , de son souffle, de ses esprits, la ravalant à la bestialité de sa matrice.
L'ancienne superstitution nommée "possession" est passée à la superstition moderne appeler "hystérie" .
L'infériorité féminine prit un autre caractère lorsque l'hystérie devint un problème scientifique..
La sorcière n'est plus, à présent, qu'une pauvre patiente, non plus méchante, mais malade. La misogynie n'a pas disparu : elle a pris une autre forme. La nature de la femme demeure aussi couptable, et même davantage. On ne cherche plus l'étiologie de la maladie dans des forces sataniques mais dans la matrice, dans la structure féminine elle-même .
La sorcière, pouvait être sauvée par Dieu. La foi pouvait restaurer sa féminité. La conception médiévale en fait une maladie religieuse, une crise de la foi.
Le Malleus Maleficarum fait dériver le mot "femina" de "fe" (foi) et "minus" (moins):la femme a moins de foi que l'homme.. rappelant la question "la femme a-t-elle une âme ?
Avec Moebius, l'insuffisance de la foi se transforma en constitution débile, en défaut psychophysiologique inné, en faiblesse d'esprit. Ce défaut de constitution fut tout particulièrement associé à la sexualité de la femme. ( pour démontrer l'hystérie on piqua la femme au moyen d'épingles,d'aiguilles; pour la guérir on inventa des procédés mécaniques comprimant ou refroidissant les ovaires, on alla jusqu'alors à l'ovarectomie et la cautérisation du clitoris ...)