FAUST ET L'ALCHIMIE

. Les Noces chymiques. évoquent 1'ouvre alchimique sous l'aspect de l' hieros gamos du frère et de la sour (Vénus met au monde un hermaphrodite = le frère et la sour). Mais ces choses ne sont exprimées qu'allusivement et sous un voile métaphorique. Parce que les enfants royaux sont encore trop infantiles (identité avec les parents, attachement incestueux à la mère), ils sont mis à mort, purifiés et reconstitués après avoir été soumis à toutes les opérations alchimiques. Pour les faire renaître à la vie on fait traverser la mer aux fiancés défunts, et on célèbre à cette occasion une sorte de fête egéenne.
Les alchimistes savaient depuis longtemps que le mystère de la transformation ne concernait pas seulement la matière chimique, mais également l'homme lui-même. La figure centrale de l'alchimie est le Mercure .. C'est un esprit chthonien, apparenté à Wotan et au diable.
Le Faust est introduit comme le Livre de Job. Mais ce n'est pas Faust lui-même qui souffre, ce sont les autres qui souffrent à cause de lui, et même le diable vient à pâtir de lui. Le Mercure y prend l'apparence de Méphistophélès (du diable et de Satan), d'abord sous les traits d'un chien, fils du chaos, être de feu . Méphisto possède deux corbeaux (cf. Wotan)..
L'Axiome de Marie (3 + 1) est présent dans toute l'ouvre.
Méphisto provoque la projection de l'anima (de Faust) , avec une issue tragique (l'infanticide). Il s'ensuit le refoulement de l'éros par la pulsion de puissance (la Nuit de Walpurgis = la submersion par 1'Ombre). Dans la magie de feu et le vertige trompeur de l'or apparaît l'adolescent conducteur du char, un Mercurius iuvenis ; celui-ci est d'une part hermaphrodite comme la forme précédente le diable, un kyllenios ; d'autre part une analogie du Christ et du Saint Esprit ; il amène aussi avec lui la horde sauvage (cf. Wotan).
Le trépied des mondes infernaux incarne la trinité féminine chthonienne (Diane, la Lune, Hécate, 3 Phorkyades).
Faust s'évanouit en tentant de prendre possession d'Hélène. Ainsi commence la seconde phase.. Faust se trouve rajeuni encore une fois ... sous les traits du Bachelier, le diable en revanche est « vieux ». L'Homunculus correspond à l'adolescent conducteur du char. Son père est Wagner.., son cousin est le diable, le Mercure sous une forme rajeunie. Faust est transporté dans le « royaume de la fable » classique (l'inconscient collectif) afin d'y être guéri. L'« eau » guérit (aqua permanens, mare nostrum). Il en surgit la montagne (renaissance de la personnalité, en langage alchimique : surgissement de la terre ferme hors de la mer). La fête égéenne est le hieros gamos d'Homunculus et de Galatée (tous deux sont des « pierres rendues vivantes ») dans la mer. Le contact du trépied avec la clé et cet hieros gamos préfigurent les noces chymiques de Faust et d'Hélène, son anima, sa sour. Leur fils Euphorion est la troisième métamorphose du Mercure.
La troisième phase s'achève avec la mort d'Euphorion. C'est encore une fois la pulsion de puissance qui préside à celle qui s'ouvre ensuite. Philémon et Baucis, qui vénèrent les dieux, sont assassinés. Après la mort de Faust le diable est berné. Le conflit demeure. À la place de Faust apparaît son entéléchie, le puer aeternus, qui n'avait jamais pu réaliser l'unification de sa double nature, parce que Faust était constamment la victime de la forme que celle-ci prenait. Faust s'égare dans l'érudition, dans les tentations d'un éros narcissique, dans la magie et l'illusion, dans l'idée délirante d'être un demi-dieu (l'épisode d'Hélène) et finalement dans l'inflation, se croyant le sauveur du monde. Il est toujours aveugle à son propre sujet, ne sachant ce qu'il fait, et dépourvu d'humour comme du sens de la responsabilité. Mais le diable, lui, sait qui il est ; il ne se ment pas à lui-même, il a de l'humour et sait aimer un peu, choses qui font défaut à Faust. On ne peut se délivrer de 1'Ombre si la conscience n'accepte pas de se l'intégrer, c'est-à-dire de comprendre le rôle compensatoire qu'elle a à jouer. L'« enfant bienheureux » n'est de ce fait qu'une simple restauration de l'état prénatal et ne permet en aucune manière de juger de ce que l'expérience de la vie terrestre a pu apporter de positif. Le Doctor Marianus est le « fils de la Mère ». . P. 99