Intégration de l'Animus représenté par l'ours et le nain :
Il s'agit ni plus ni moins, dans ce conte, du problème de l'intégration du côté masculin, des qualités viriles, au monde féminin. Toute la difficulté consiste à le faire de la façon juste, sans aller trop loin, ce qui reviendrait à tomber dans l'extrême opposé et à prendre non les qualités, mais les défauts masculins.
L'ours et le nain représentent deux formes d'animus l'un d'eux, réagissant continuellement à contre-temps,est irrité et irritant et provoque partout et à tout propos de perpétuelles querelles.
L'ours représente ici une réaction équilibrée : il n'est habituellement ni de mauvaise humeur, ni
coléreux
Il représente I'instinct viril agressif correctement vécu : il sait pour quelle raison il agit ainsi et le fait sans les hésitations ni la faiblesse dues à l'incertitude.
Il suscite chez la femme une réaction émotionnelle positive: le droit à l'autodéfense et à la contre-offensive -lorsqu'il s'agit d'éviter d'être terrassé par l'animus ou l' anima négatifs, ou tout autre mal qui rôde autour de soi -existe.
Celui qui en est tout à fait incapable est réellement malade.
Le nain est l'image du caractère contrariant et irritant que peut prendre l'animus.
Il s'empêtre dans des querelles, des discussions niaises et perd tout sens de l'humour ; il se montre ingrat et déborde de soif de puissance.
Ces disputes jaillissent de la moindre étincelle, a la façon d'un incendie : la voix s'élève ou au contraire le ton baisse, et tout le monde en est affecté. Le nain se livre, en outre, a toute une série d'actes stupides...
Un des traits classiques de l 'animus négatif est de tout exiger à partir de la conviction inavouée que tout lui est dû.
Cette attitude revendicatrice est compensatrice d'une attitude par trop consentante.
Cet excès est inévitable en un premier temps, et l'on peut dire qu'il était nécessaire que surgisse ce nain, car une femme ne peut rencontrer le prince - l'animus positif et la bonne relation à l'homme - sans être passée par ce stade intermédiaire. Pour intégrer l'animus, il faut prendre conscience de son existence en le laissant P.117 d'abord se manifester à l'extérieur, même si, du fait qu'il s'est longtemps trouvé abaissé et refoulé, il commence par se montrer sous un jour peu sympathique. . On n'atteint pas .. le bon équilibre instinctif du premier coup, mais seulement par des détours et en adoptant, au préalable, une attitude surcompensatrice.
Si un nain qui, par définition, est habile, s'avère aussi maladroit que celui de ce conte, il est sa propre négation, il ne devrait pas exister. Il représente I'état de contradiction avec soi-même et d'irritation que provoque Ia création non vécue.
Quand ce genre d'animus s'empare de l'esprit d'une femme, c'est généralement le signe qu'elle possède des dons créateurs qu'elle n'a pas encore réussi à mettre en ouvre. Le débordement de libido créatrice qui n'est pas utilisé à bon escient se transforme en sentiments de frustration et en mauvaise humeur, il crée des complications et risque de jouer de mauvais tours.
Si une femme est habitée par un tel état d'esprit, n'en a pas conscience et ne comprend pas ce qui le motive, elle risque d'avoir un effet destructeur sur son entourage. Le remède réside dans quelque activité créatrice ; peut-être cette personne vous dira-t-elle que dans son adolescence elle désirait écrire, ou être peintre, ou faire de la céramique, des études ou je ne sais quoi d'autre, ou bien ses rêves suggèreront une direction à suivre, et elle pourra, dans une certaine mesure, se mettre à exercer ce talent demeuré enfoui jusque-là ; ainsi, le nain pourra entrer dans ses droits en accomplissant ce pour quoi il est doué. Il ne s'agit pas forcément de dons exceptionnels mais de comprendre ce que l'inconscient veut réaliser.
Si le conscient de la femme ne vient pas en aide à son animus en lui permettant de s'exprimer, celui-ci cherche son propre chemin, interfère dans sa vie et y crée des ennuis. Il exige sa part d'existence et accéder à sa demande équivaut à reconnaître les demandes de l'inconscient.
Dans une structure matriarcale comme celle du début de ce conte, l'ours mâle figure un aspect de l'animus qui s'oppose au nain. Si, dans un contexte masculin et patriarcal, il représente l'état berserk et la colère froide, dans le contexte féminin, il représente l'instinct viril agressif correctement P.119 vécu : il sait pour quelle raison il agit et le fait sans les hésitations ni la faiblesse dues à l'incertitude.
Si l'on sent que, dans une situation donnée, l'attitude agressive est juste, il n'est nul besoin de hurler : la colère se transforme et le calme s'instaure, et l'on agit sans hâte superflue : la colère a été intégrée. Transposé sur le plan psychologique, cela signifie qu'une attitude plus adulte et plus adaptée a mûri chez ces jeunes filles, et qu'elles sauront désormais conduire leur vie avec suffisamment d'assurance et de confiance en elles pour trouver leur épanouissement ; une saine réaction instinctive ayant écrasé en elles leurs humeurs infantiles et négatives, elles seront capables de rencontrer le prince.
Le nain est un voleur qui s'empare des trésors de l'ours. Cette sorte d'animus destructeur dérobe les possibilités et les richesses de l'animus positif.
Un animus peut désirer obtenir ce qu'il veut par un raccourci peut recommandable: exemple de l'animus escroc.
Les idées fausses de l'animus sont expertes en I'art de fournir des petites doses quotidiennes de poison. Au cours de l'analyse d'un pareil cas, tôt ou tard, il se produit un moment où la personne est acculée à reconnaître qu'elle se ment à elle-même et n'écoute pas les avertissements intérieurs.P.123
La barbe est quelque chose d'involontaire qui pousse autour de la bouche.
II arrive que les pensées et les mots jaillissent de notre bouche sans que nous les ayons pensés - ils se forment pour ainsi dire d'eux-mêmes.
Le verbalisme automatique et nerveux est un symptôme névrotique typique de notre civilisation hyperintellectuelle, que l'on rencontre particulièrement chez les femmes (bien que non exclusivement !). Ce débit incessant se prolonge interminablement sans que rien d'intéressant ne soit dit. Ce flot de paroles tout à fait autonome et inconscient crée d'énormes difficultés. . P.127
La barbe de l'animus, sont ces pensées qui s'expriment involontairement. Exemple du mari souffrant des scènes que lui faisait sa femme, sans qu'il pût jamais la convaincre qu'elle avait effectivement prononcé les paroles incriminées. Un jour, il l'enregistra sans qu'elle s'en aperçût, puis à un moment favorable, il lui fit entendre la scène. En dépit du fait qu'elle entendait sa propre voix, elle soutint qu'elle n'avait jamais prononcé ces mots. «Cela » avait parlé, les choses s'étaient dites d'elles-mêmes sans qu'elle en eût conscience.
La barbe du démon ou du nain représente cet aspect verbeux de l'animus. Il faut l'attraper fermement et lui dire : « Je ne te laisserai aller qu'a telle ou telle condition », et se demander qui parlait, si ce n'était pas moi. C'est dans ce genre de paroles irréfléchies que l'on peut le plus aisément prendre l'animus sur le fait. Le nain s'y empztre : il se prend a son propre picge et de plus, il fait montre d'un attachement et d'une vanité narcissiques et tout a fait infantiles pour cet attribut encombrant.
Quand l'animus part ainsi sur une mauvaise pente, il finit généralement par se contredire : il se fait prendre a son propre flot de pensées inconscientes, c'est pourquoi la seule chose a faire pour les petites filles eut été de le laisser s'arranger avec sa fameuse barbe.
Lorsqu'on se surprend ainsi a se démentir, il est bon de s'arrzter pour prendre du recul et de se demander ce que l'on désire vraiment exprimer.
Mais, au lieu de cela, les petites filles délivrent le nain, ce qui lui permet de continuer a nuire, jusqu'a ce que l'ours le tue -c'est-a-dire jusqu'a ce que l'animus suscite chez la femme une réaction émotionnelle positive. Les femmes finissent habituellement par se lasser de leur propre animus négatif et cherchent a s'en délivrer.